Poèmes en hommage à mon père
PAS QUESTION…!
Hélas, si je m’ennuie…
Moins que la vie…
Mais d’y être assidu.
Hélas, si je languis…
J’ai la réponse…
Hélas, hélas…
Si je maudis…
Souvenirs des apparences…
L’oubli et l’ignorance.
FUMIGÈNES
Je veux… m’enfermer
Au petit matin enfumé,
Aux sables roses des nouveau-nés.
Comme il se doit, comme pour moi…
Délivrer à nos âmes, les rares esprits du bois.
Avaler d’un seul trait
L’acre suie blanche des éléments.
En souffler la rosée
Au premier déploiement
Et armer de leur voix
Le cœur de tous les vents.
Humer la terre
L’eau et le feu.
Le volatile.
M’informer des essences.
Et rendre au dernier-né
Tout ce qu’elles ont d’utile
WALKING TREE
Du sang donné à la terre
L’arbre s’est avancé
Des racines neuves y ont poussé
Et s’en sont allés boire à nos plaies
Ses langues séchées vont rompre
Au jeun des sources profondes
Un sang nouveau déjà
Ruisselle sous table
Où il s’abreuve
Et sur laquelle il trône
Le champ de guerre d’où il est né
Ne rend plus aujourd’hui
Que des os de misère
Et les canaux creusés pour lui
Ne charrient plus que leur infâme poussière
Nul sillon ne se creuse
A travers l’océan
Mais la cale remplie des bateaux
Contient de précieux éléments
Qui iront dès demain
S’épancher à son pied
COW-EYED-MEN
Mon œil se fige
À la mansarde ouverte
Tout près de l’ombre
Des colonnes d’ascenseurs
Fixant le ciel blanchi
De l’évidoir
À mes trois estomacs
De là, je pisse un lait à douze degrés
Sur l’herbe verte des prés feuilletés
De mes cinquante prairies
De mes champs verticaux
Hautes plaines et décimales
Regardant passer les avions
Je gratte le cul du ciel
Et je rumine la vie des hommes
En bas
Qui paissent
Enfin
PASSE-PORT
C’est un six-coups, une arme.
Mitraille sévère
Ou silicieuse
Nul feu n’aura manqué sa cible
Un cœur, un ventre
Parfois une âme
Une cicatrice
Qu’a-t-il encore besoin de servir ?
Tant ont été touchés
Dans ces guerres légendaires
D’armes cuivres-tambours et d’aciers fins
Cent milles rafales ont bien été tirées
Lamentos écriés
Vrille-tympan
Et jurons étouffés
Les douze esprits-fantômes
Fins cristaux de l’au-dible
En ont porté les mots
À notre connaissance
Codé le sens
Pour les rendre moins amers
Et uni les secondes
LA NYMPHE EXCÉDÉE
Que n’ai-je le tort
D’aimer encore
De ces frises en cascades
Les péchés de velours
Les grands lacs irisés
La nacre méchanceté
Sublime évaporée
De ce puissant amour
Pris à la gorge
Que n’ai-je le tort
D’aimer encore
Celle que je n’ai aimée tantôt
L’épure du paysage
Le son des blés
Les parfums secs
De sa chair horizon
Que n’ai-je osé
Pour me surprendre
À son mépris
Ou à sa compassion
CRÉPUSCULE
Sur ta joue pâle, rond de sang
Aux monts roses de tes lèvres
Qui s’entrouvrent à la nuit
Un souffle se libère
Et délivre des congères
L’instant de tes yeux
Dans le soleil du soir
DES PREUVES… !
D’entre mes lèvres
Et de derrière mes dents
Dessous, dessus ma langue
Et mon palais en ruine
De mon gosier à sec
Mon oiseau-phage
Des cailloux dans mon estomac
Aucune insignifiance
Ne doit sortir
Ni de ta bouche
Ni de nulle part
Il est grand temps de murer le silence
De questions seulement
Et d’en attendre les preuves